De l’autre côté des Alpes, le 25 avril est la date anniversaire de la libération du pays par les partisans antifascistes. C’est un jour férié avec une portée mémorielle. Comme chaque année en Italie, différents clubs de football populaire ont célébré ce jour. Au-delà de la commémoration, ils affirment la nécessité de combattre le fascisme au présent. L’arrivée de l’extrême-droite au pouvoir montre qu’il n’a jamais été éradiqué en Italie.
La veille de la commémoration, une poignée de membres des Irreducibili de la Lazio, accompagnés de quelques congénères de l’Inter, ont déployé une banderole provocante rendant hommage à Mussolini. Présents à Milan pour la 1/2 finale retour de Coupe d’Italie, ils en ont profité pour réaliser leur mise en scène sur le Corso Buenos Aires, à proximité de Piazzale Loreto, lieu où avait été exposé le corps de Mussolini pendu à un crochet de boucher. Ce petit coup de communication néo-fasciste a été largement relayé par les médias qui leur ont offert une publicité à moindre frais. Le site Sport Popolare rappelle à juste titre sur les réseaux sociaux, que la meilleure réponse à leur petite démonstration « est celle qu’ils ont reçu dans les rues de Francfort, au port de Marseille ou dans les ruelles de Séville », faisant référence aux récentes fessées reçues par les ultras de la Lazio lors de ces déplacements.
Ce 25 avril 2019 un grand nombre d’événements militants ont été organisés. Lors de ces divers rassemblements, parfois ponctués de moments festifs, plusieurs clubs de calcio popolare ont été de la partie et ont tenu à honorer la mémoire des partisans et des partisanes antifascistes qui ont libéré le pays de l’occupation nazie-fasciste. Dans un communiqué intitulé « Quand le football est synonyme de résistance », publié pour l’occasion, le club toscan Spartak Apuane pose la question – pour mieux y répondre : « Que peut bien relier un beau jeu comme le football à un beau moment historique comme la résistance en Italie ? »
Le RFC Lions Ska Caserta, en Campanie, a salué la mémoire de Carlo Santagata, jeune partisan de 16 ans originaire de la région, qui attaqua seul une colonne de la Wehrmacht avec son fusil, avant d’être capturé et exécuté. A côté de Naples, le Lokomotiv Flegrea a organisé une journée antifasciste, « Du sport aux rues », dans le cadre de laquelle ils ont accueilli des membres de la No Racism Cup de Lecce venus présenter leur livre Un calcio al razzismo, 10 ans d’antiracisme dans le Salento. Ces actions démontrent encore une fois l’attention des clubs de calcio popolare en Italie à ne pas se focaliser uniquement sur le rectangle vert. Ce 25 avril est un nouvel exemple de leur rôle d’éducation populaire dans la défenses de valeurs d’entraide et de solidarité.
Ce que le Spartak Apuane décrit avec justesse. « Pendant des années, nous avons vu utilisé le football pour créer des barrières, nous l’avons vu utilisé pour gonfler le portefeuille des capitalistes de service. Nous avons vu, toujours au nom du football, exalter l’individualisme le plus extrême, le culte de la compétitivité, le racisme et le modèle de société patriarcale. Nous avons donc vu le football utilisé comme bouclier pour défendre ce monde si cher aux maîtres et aux fascistes, ce monde où ce sont toujours les exploiteurs qui gagnent et jamais les exploités. Mais si le courage c’est aussi de maintenir le regard sans jamais fermer les yeux, alors nous avons aussi un autre football, notre football […] Nous avons vu un football qui a choisi de ne pas se plier aux logiques imposées par le marché, un football basé sur la passion, toujours prêt à se battre la tête haute face au fascisme, au racisme et au sexisme. Nous avons fait le choix d’être un football partisan. »
“Siamo tutti antifascisti !”
Ce football partisan, la Frazione Calcistica Dal Pozzo aurait aimé, même si les titres sont secondaires, l’inscrire en haut du palmarès. En finale de Coupe de Lombardie pour les clubs de 3e catégorie, ils ont été battus aux tirs au but par Gottolengo AC Il est vrai que le symbole aurait été beau en ce 25 avril. Mais l’issue défavorable n’a pas empêché les supporters de faire résonner le traditionnel cri “Siamo tutti antifascisti !” (Nous sommes tous antifascistes !) encore plus fort que d’habitude.
L’important était ailleurs. Dans une période où le gouvernement italien défend le repli du pays sur ses frontières, le football populaire est un vecteur de résistance important. Loin des célébrations de façade, le Spartak Apuane rappelle que la mémoire des partisans et partisanes antifascistes s’honorent en luttant au présent. « En ce moment historique, il est de notre devoir de continuer à résister, sur l’asphalte comme sur le gazon, sans aucune trêve. Exactement comme l’ont fait les compagnons et les compagnes dont nous nous rappelons aujourd’hui et que nous commémorons. »
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