
Les supportrices sont de plus en plus nombreuses à se plaindre des fouilles intrusives à l’entrée des stades. Face à ces agressions sexuelles, leur parole se libère et c’est tant mieux, bien qu’elles se heurtent à un double mur, sécuritaire et sexiste, cimenté par l’idée reçue que leur corps servirait à faire passer le matériel prohibé.
Sur les réseaux sociaux, des supportrices de plusieurs clubs témoignent. Dans ces bastions masculins que sont les stades, en plus des cas d’agressions et de harcèlement sexuels, les supportrices sont de plus en plus nombreuses à se plaindre de fouilles abusives et intrusives à l’entrée. Suite au derby entre Lille et Lens disputé le 30 mars dernier au stade Pierre-Mauroy, des supportrices lensoises ont porté plainte pour ces raisons.
Une d’elles, membre d’un groupe ultra, a raconté au micro du podcast Reporterter du Mouv’, avoir été fouillée de façon très violente par une stadière: “On a eu main sur la poitrine, on a eu main au-dessus de la culotte, jamais sous les vêtements mais certaines filles ont senti des doigts sur leur sexe. C’était encore plus violent que d’habitude, parce que par moment c’est déjà très hard, à la limite du supportable. Cette fois, c’était pas normal“.
“Même si c’est une femme, ça touche à mon intimité…”
Au début de la saison, lors du déplacement de Monaco, des supportrices de l’AS Saint-Étienne avaient témoigné de fouilles corporelles qui dépassaient de loin les palpations de rigueur à l’entrée des stades. Quelques semaines plus tard, des supportrices nantaises dénonçaient le même type d’attouchements à l’entrée du stade Raymond-Kopa à Angers. Des mains qui se sont baladées “très haut entre les jambes” remontant “jusqu’au soutien-gorge“.
Ces fouilles poussées ne sont rien d’autre que des violences sexistes et sexuelles. Le fait que ce soit des femmes qui les commettent ne change pas grand chose. “Même si c’est une femme, ça touche à mon intimité“, expliquait cette supportrice des Canaris au quotidien Ouest-France. Malgré l’afflux de témoignages et de plaintes, cette pratique des fouilles corporelles abusives n’est pour l’instant pas vraiment remise en question.
Entre août et octobre 2023, quatorze supportrices de clubs qui avaient affronté le Havre Athlétic Club au Stade Océane avaient déposé plainte pour agression sexuelle suite aux fouilles humiliantes pratiquées à l’entrée de la tribune visiteurs. Toutes dénonçaient des palpations particulièrement poussées, notamment au niveau de la poitrine et du sexe. Les plaintes ont été classées sans suite par le procureur. La direction du HAC avait préféré déplorer l’écho médiatique, sans un mot pour les supportrices.
Criminalisation des tribunes et sexisme
La parole se libère, c’est un fait, mais elle doit affronter, comme dans le reste de la société, un dénigrement général: de la part des clubs – responsables de la sécurité et des dites “palpations” – mais aussi de la Justice et même récemment de la ministre des Sports. Marie Barsacq est accusée d’avoir, lors d’une récente plénière de l’Instance Nationale du Supportérisme, sorti que les fouilles seraient moins agressives si les supportrices ne cachaient pas de fumigènes dans leurs parties intimes.
La stigmatisation sexiste des supportrices est ici mise au service de la criminalisation des tribunes. L’Association Nationale des Supporters (ANS) a fait part de sa consternation, évoquant “une légende urbaine démentie par tous les spécialistes“. Recevant de plus en plus de témoignages, l’ANS souhaite voir en urgence le gouvernement bouger au sujet des fouilles abusives. “La nouvelle génération n’a pas du tout envie que ça devienne la norme“, prévient une membre du bureau de l’ANS à Mouv’.
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