La LFP a autorisé à titre exceptionnel l’utilisation des fumigènes à l’occasion de la réception de Grenoble par le TFC, ce samedi au Stadium de Toulouse. Une expérimentation qui ressemble à un premier pas vers un assouplissement de la répression, mais qui soulève aussi quelques réserves.
Le 10 septembre dernier, le Toulouse Football Club se réjouissait sur son site que sa demande faite auprès de la LFP ait trouvé une réponse favorable. Les supporters violets allaient pouvoir utiliser, “dans un contexte encadré et sécurisé“, fumigènes et autres feux de Bengale. Le principe de ce type d’expérimentation avait été validé par la ministre des Sports, mais la pandémie a retardé leur mise en place.
A première vue on ne peut que se féliciter de ce type d’annonce. La répression a été telle ces dernières saisons que voir les instances lâcher du lest au sujet des fumigènes donne la sensation de souffler, voir même d’être sur la bonne voie. Toute la question est de savoir comment sortir de cette impasse où la réponse répressive n’est qu’un concentré d’absurdité, mais où de toute évidence les autorités refusent de désavouer des années d’abus en autorisant simplement aujourd’hui ce qu’ils ont interdit et sévèrement sanctionné hier.
“Le droit, mais seulement quand, où et de la manière dont on te le dit”
Cette expérimentation nous ramène en plein dans le juste milieu prôné par le Rapport Houlié/Buffet qui met en cause le tout répressif d’un côté, et appelle les supporters à faire des concessions de l’autre. Ce qui va se passer à Toulouse nous montre le type de concessions auxquelles les ultras doivent s’attendre. Elles portent principalement sur la sécurité. Ainsi, les autorités se donnent une image d’ouverture sur un sujet où elles se sont montrées des plus obtuses, et se posent en protectrices d’ultras qui n’ont de toute évidence pas besoin d’elles en matière d’utilisation des fumigènes.
A l’occasion de Toulouse – Grenoble, comptant pour la 8e journée de Ligue 2, les Indians Tolosa vont donc pouvoir craquer des fumigènes sous le protocole expérimental autorisé par la LFP. Ce sont seize supporters équipés de gants et de lunettes de protection – et qui auront suivi une formation avec un artificier le matin même – qui ont donc allumé les fumigènes dans une zone spécifique située au pied du secteur de la tribune Brice-Taton, occupé par les Indians, et seulement au moment de l’entrée des joueurs. En d’autres termes, t’as le droit, mais seulement quand, où et de la manière dont on te le dit.
Verre à moitié vide ou à moitié plein, le verdict revient aux principaux animateurs des tribunes. Interviewé avant le match par France Info, le président des Indians Tolosa, reconnaît qu’un pas a été fait dans leur direction et voit ça plutôt d’un bon œil, mais espère que cette expérience ouvrira la voie à une utilisation moins stricte que ce qui est proposé. “Nous protestons sans cesse contre les répressions abusives mises en place contre les personnes qui utilisent des fumigènes. Certains membres de notre groupe se sont fait perquisitionner à leur domicile pour des histoires de craquage. Encore aujourd’hui, certains sont interdits de stade. À terme, nous espérons pouvoir utiliser les engins pyrotechniques plus librement. Ou au moins qu’il y ait des sanctions moins disproportionnées envers ceux qui les utilisent.”
Pour un arrêt pur et simple de la répression
L’encadrement par un artificier professionnel a de quoi faire sourire. Qui est plus “qualifié” qu’un ultra pour craquer un fumigène en tribune? Ce chaperonnage laisse d’ailleurs dubitatif le président des Indians. “Les seize personnes choisies ont toute l’habitude de manipuler des fumigènes, nous verrons bien à quoi servira la formation.” Même s’il ne faut pas nier le risque de brûlures, le Rapport Houlié/Buffet rappelait d’ailleurs que les accidents, très rares, étaient surtout le résultat direct de cette interdiction contraignant les supporters à prendre plus de risques et à allumer les torches “en se dissimulant notamment sous des bâches qui ne sont pas ignifugées.”
Plus qu’une question de sécurité, c’est une question d’autorité qui est en jeu. Alors que la répression n’a jamais empêché une utilisation des fumigènes – qui était même en hausse avant l’épisode Covid et les huis clos – les instances veulent sauver la face et garder la main sur cette thématique à laquelle elles n’ont su opposer qu’une absurdité mécanique. Cette saison, Rennais et Marseillais ont d’ailleurs déjà été sanctionnés par la commission de discipline de la LFP. La réalité c’est que l’expérimentation toulousaine, toute aussi réussie soit-elle, s’apparente à un cérémonial infantilisant. Toute cette mise en scène n’est qu’une variante de l’hypocrisie au sujet de l’utilisation des fumigènes en tribunes. La seule réponse adaptée qui y mettrait fin c’est l’arrêt pur et simple de la répression et des sanctions.