
Le club de Brescia est en passe d’être déclaré en faillite avant d’être probablement refondé sous un nom différent en division inférieure. Cette situation attire les vautours déguisés en sauveurs. Certains espèrent capitaliser sur cette faillite via une fusion avec la Feralpisalò. Les ultras de Brescia s’y opposent catégoriquement.
Ces dernières semaines, il est devenu de plus en plus évident que le rideau allait tomber sur Brescia. Triste épilogue après 114 ans d’histoire, dont 23 saisons en Serie A, et une 8e place comme meilleure performance accrochée lors de la saison 2000/01. Un club qui a vu passer dans ses rangs des stars comme Roberto Baggio, Pep Guardiola ou Andrea Pirlo.
Comment Brescia a-t-il pu en arriver là? Une histoire finalement banale dont le football italien a la fâcheuse habitude. Parme ou la Fiorentina sont notamment passés par là. Dans le viseur du Covisoc (la DNCG italienne) et de l’Agenzia delle Entrate (l’équivalent du FISC), le Brescia Calcio n’aura pas survécu à l’audit de ses comptes qui ont mis à jour plusieurs irrégularités et communications mensongères.
Des difficultés économiques connues
Alors qu’il avait terminé la saison de Serie B à la 15e place, la Fédération l’a pénalisé d’un retrait de 4 points pour différentes infractions, notamment des cotisations impayées et des arriérés fiscaux. Ce retrait de points l’a rétrogradé à la 18e place, synonyme de relégation directe en Serie C. Mais il n’est d’ors et déjà plus dans les clous pour pouvoir s’inscrire dans la division.
Cette suspension est le résultat de la décision du propriétaire Massimo Cellino de ne pas remettre à flot le club – endetté à hauteur de 8 millions d’euros – en versant 3 millions d’euros avant le 4 juin, puis une garantie de 800 000 euros supplémentaires les semaines suivantes. C’était un secret de polichinelle que Cellino – ancien propriétaire de Cagliari et de Leeds – avait décidé de se débarrasser du club.
Les difficultés économiques du club, et son cruel manque de ressources, étaient en effet connues. Et le climat interne était délétère. Le conflit entre Cellino et son directeur général Luigi Micheli a encore plus enfoncé le club dans la crise. En poste depuis cinq ans, Micheli a démissionné au mois de février. Dans la foulée, Cellino l’a accusé de fraude, de détournement de fonds et de blanchiment d’argent.
Les clubs “mineurs” à la rescousse?
Sur ce champ de ruines encore fumantes que Giuseppe Pasini, propriétaire de la Feralpisalò (qui est passée près de la montée en Serie B), est arrivé sur son cheval blanc. Son projet: effectuer un transfert de propriété de son club actuel à Brescia, pour continuer à avoir une équipe en Serie C, même sous une nouvelle identité, et pouvoir jouer au Stade Rigamonti. Faute de quoi, la future équipe repartirait en Eccellenza, la 5e division.
La date butoir pour réaliser ce transfert est fixée au 15 juillet, mais Pasini sait qu’il n’y a pas de temps à perdre et travaille déjà sur la construction d’un effectif. Pour certains, le défi relève de la mission impossible, mais l’exemple de Naples, passé par là dans le passé, est cité comme modèle. Il s’est d’ailleurs mis à dos les ultras de la Feralpisalò. Leur club est tout simplement voué à disparaître dans une telle opération.
Les politiciens veulent aussi mettre leur grain de sel. Laura Castelletti, la maire de Brescia, a ainsi déjà organisé des tables rondes avec les présidents des principaux clubs de la province – la Feralpisalò, Lumezzane et Ospitaletto – pour œuvrer au maintien d’un club dans la ville principale. Les ultras dénoncent un opportunisme de la part de gens “qui, à quelques exceptions près, ont toujours ignoré la cause des Biancoblù”.
Les Ultras Brescia 1911 s’opposent au processus
Certaines figures semblent se ranger derrière cette option dès lors que le nom de la nouvelle entité ne fait pas référence à Feralpi ou Lumezzane dans son nom et que les couleurs du Brescia Calcio sont préservées. Si l’objectif désigné est de préserver le patrimoine du club historique et de récupérer le plus vite le nom de Brescia Calcio, dans un premier temps, elle devrait s’appeler “Brixia” ou “Leonessa”.
Le principal groupe, les Ultras Brescia 1911, ont pour leur part fait part de leur opposition radicale à ce qu’ils présentent comme “une fusion aussi machiavélique qu’écœurante”, dans un communiqué en forme de lettre ouverte adressée à Pasini. “C’est certainement le choix le plus rapide et le moins laborieux”, expliquent-ils, avant de se poser en garants de l’histoire et du patrimoine du club.
“Ne faites pas les mêmes erreurs que ceux qui vous ont précédé; si vous y tenez vraiment, préservez l’histoire authentique de Brescia, sans sacrifier celle de Salò”, écrivent-ils. Le cas de Brescia est une illustration de plus de la faculté du football moderne à démanteler froidement les liens soudés entre un club, ses supporters et son territoire.
Le football appartient au peuple!
“Ne vous fiez pas à ceux qui vous disent que tous les supporters de Brescia sont heureux de votre arrivée. Ne vous fiez pas à ceux qui sont prêts à tout (même à se taire) pour rester dans la même division. Ne faites pas confiance à ceux qui sont prêts à renier même le maillot, qui pour beaucoup de supporters blancs et bleus a encore une valeur historique, sentimentale et sociale”, poursuivent-ils.
Il peut encore se passer beaucoup de choses lors des prochaines semaines. L’avenir du football à Brescia n’est pas écrit. Les ultras mettent en tous cas en garde. “N’oubliez pas: le football appartient au peuple, et Brescia appartient à ceux qui l’ont toujours aimé, quel que soit le président!”. Giuseppe Pasini, Laura Casteletti, et tous ceux qui veulent redessiner artificiellement la carte du football local sont avertis.
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