Coupe du Monde des clubs, sur fond d’émeutes contre les raids anti-migrants de la police de Trump

(©Jae C. Hong/AP/SIPA)

A Los Angeles – où le PSG a installé ses quartiers – l’autodéfense populaire contre la politique xénophobe de Donald Trump relègue au second plan une Coupe du Monde des clubs qui peine à passionner les foules. Les supporters locaux ont clairement pris parti contre les expulsions massives et la police de l’immigration. 

Pour l’ouverture de la Coupe du Monde des clubs, l’Immigration Customs Enforcement (ICE) et le Customs and Border Protection (CBP) étaient présents aux abords du Hard Rock Stadium de Miami. Derrière ces sigles, des policiers fédéraux quadrillent le territoire et ont carte blanche pour traquer les immigrés sans-papiers, les rafler et les faire expulser. Leur présence lors d’événements sportifs majeurs n’est pas inédite, comme on a pu le voir lors du dernier Super Bowl. Les autorités ont fait savoir à cet égard que les fans étrangers devront détenir un document prouvant la légalité de leur présence sur le territoire.

Un message hostile envoyé aux supporters internationaux à un an du Mondial 2026 que les États-Unis co-organiseront avec le Canada et le Mexique. Blocages, émeutes, ou initiatives plus symboliques, l’objectif trumpiste de réaliser ce qui est présenté comme “la plus grande opération d’expulsion de l’histoire des États-Unis”, trouve sur sa route une résistance large de la communauté. Gianni Infantino qui a affiché sa proximité avec Donald Trump fait corps avec son ami et cherche à sauver la face de sa Coupe du Monde des clubs dont on sait qu’elle ne provoque qu’un tiède engouement. Craignant un bide mondial et des stades clairsemés, la FIFA a même bradé les billets qui ne trouvaient pas preneur.

Los Angeles, épicentre de la révolte

Depuis le 7 juin dernier, les émeutes pour s’opposer aux raids anti-migrants de l’ICE se multiplient aux États-Unis, avec Los Angeles pour épicentre. La ville a une longue tradition de lutte antiraciste et de solidarité avec les travailleurs immigrés, notamment issus de la communauté mexicaine. La moitié des 10 millions d’habitants du comté de Los Angeles sont latinos et 16 % sont asiatiques. Un tiers des habitants sont nés hors des États-Unis. Lorsque les agents fédéraux ont commencé à effectuer des descentes sur les lieux de travail à Los Angeles, il n’est pas surprenant qu’ils aient rencontré une résistance collective spontanée.

Lors du match face à Kansas City, les supporters du LAFC ont exprimé leur volonté voir la police de l’immigration dissoute.

L’État fait face à un soulèvement populaire qu’il n’arrive pas à calmer. Il a déployé 4 000 soldats et réservistes de la Garde nationale ainsi que 700 Marines à Los Angeles. Trump a également menacé d’activer “l’Insurrection Act”, une loi d’exception autorisant l’intervention de l’armée pour réprimer les manifestants. L’administration Trump met le paquet pour militariser la réponse de l’État, autant pour poursuivre les rafles que pour écraser la contestation. Les agents fédéraux ont l’objectif d’arrêter et d’expulser 3 000 personnes par jour, soit un million par an!

C’est dans ce contexte que la Californie va héberger six matchs de la Coupe du Monde des Clubs du 15 au 25 juin, au Rose Bowl de Pasadena. Rien ne semble toutefois mettre en péril ces matchs qui concernent les groupes B et E. L’Inter Milan, le Paris Saint-Germain, Botafogo, le CF Monterrey, Urawa Red Diamonds, River Plate et l’Atlético de Madrid vont y disputer au minimum un match. Un contexte de tension déjà palpable pour la délégation de l’Atlético de Madrid, hébergée dans un hôtel de Downtown, dans une zone soumise au couvre-feu, décrété par la maire démocrate de Los Angeles.

Supporters et clubs solidaires des immigrés

Attaquant du Los Angeles FC, Jeremy Ebobisse a exprimé son soutien aux banderoles des supporters de son club dénonçant la chasse aux immigrés menée par l’ICE, et d’autres forces de la police fédérale. Lors du match de Major League Soccer (MLS) face à Kansas City, “The 3252” – collectif de supporters du LAFC – a déployé une banderole “Abolish ICE” en tribune avant le coup d’envoi, puis est resté silencieux tout au long du match. A d’autres endroits du BMO Stadium, d’autres messages étaient lisibles comme “Quand l’injustice devient la loi, la résistance devient un devoir”.

Qualifié sur le gong pour cette édition de la Coupe du Monde des clubs, le LAFC jouera ses trois matchs de poule en Floride. Cela éloigne le club de sa communauté le temps de la compétition, et arrange les autorités. Mais cela ne réduit pas tant la possibilité de voir s’immiscer la jonction entre le mouvement social et les groupes de supporters au moment des matchs. Les manifestants peuvent aussi compter sur l’Angel City FC – équipe féminine de Los Angeles, évoluant en National Women’s Soccer League (NWSL) – qui est allée un peu plus loin dans son soutien aux communautés immigrées de la ville.

A l’occasion de la réception de l’équipe de North Carolina Courage, les joueuses ont arboré un t-shirt avec le slogan “Immigrant City Football Club”. “L’expression ‘Immigrant City FC’ renvoie non seulement à la composition de la ville-même et à la manière dont nous la représentons, mais aussi à l’identité de notre équipe”, a expliqué Yaoziuatl Martinez, coordinatrice médias du club. “Le tissu de cette ville est fait d’immigrés. Le football n’existe pas sans les immigrés. Ce club n’existe pas sans les immigrés”, a écrit l’Angel City FC dans une déclaration distribuée au public et lue avant le match par la chanteuse d’origine mexicaine Becky G, actionnaire du club.

Un peu comme on l’avait vu lors de la révolte sociale au Chili en 2019, l’autodéfense populaire qui s’est dressée dans les rues de Los Angeles a un écho jusque dans les clubs de football. De leur côté, Trump et Infantino annoncent la couleur en vue du prochain Mondial. Une façon d’être transparente sur son intention d’utiliser politiquement l’événement-phare de la FIFA, qui a montré au cours de son histoire son attrait pour les régimes autoritaires, en lui appliquant son programme sécuritaire cypto-fasciste. Comme souvent, la meilleure réponse pourrait venir de la rue, et d’un boycott actif et massif de l’événement.

Édito n°72

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