L’organisation du match de Liga entre le Barça et Villarreal à Miami a été abandonnée presque aussi vite qu’annoncée. Javier Tebas, Relevent Sports et les deux clubs concernés se sont heurtés à fort rejet populaire. Un lourd revers pour le président de LaLiga qui cherche depuis plusieurs années à exporter des matchs de championnat.
Les grands clubs européens ont pris l’habitude de s’affronter à l’étranger lors de tournées estivales promotionnelles et, depuis moins longtemps, à l’occasion des “Supercoupes”. En Espagne, la Supercopa – propriété de la Fédération – se joue en Arabie Saoudite depuis 2020. Délocaliser un match de championnat dans un autre pays – sur le modèle de la NBA – marquerait une étape de plus dans un football commercialisé à outrance et toujours en quête de nouveaux revenus. Si l’UEFA a rappelé son opposition de principe, elle a accordé une dérogation “à titre exceptionnel” à la Liga, tout comme à la Serie A pour le match Milan AC–Côme en Australie, en février 2026. L’UEFA a fini par donner son feu vert, invoquant le flou du règlement de la FIFA sur la question.
Dans la foulée et malgré une opposition croissante, LaLiga et son président Javier Tebas avait publiquement annoncé la tenue du match Barcelone-Villarreal, le 20 décembre prochain au Hard Rock Stadium de Miami Gardens, enceinte de la franchise NFL des Miami Dolphins. Seulement, le plan ne s’est pas déroulé comme prévu et la décision a été prise, deux semaines plus tard, d’annuler l’événement. Relevent Sports, promoteur américain de l’événement, a préféré renoncer en raison de “l’incertitude générée ces dernières semaines en Espagne”. Dans sa lutte contre Tebas et sa rivalité avec le Barça, l’influent Real Madrid menaçait en effet de bloquer le projet, arguant une rupture d’équité sportive notamment en ne respectant pas le format de confrontations aller-retour avec un match à domicile et un match à l’extérieur.
Les joueurs contrarient les plans de Tebas
Mais la fronde est aussi venue des joueurs, tous clubs confondus. Les dernières journées de Liga ont été marquées par des protestations symboliques des joueurs, en restant immobiles après le coup d’envoi. Une grève de quinze de secondes, soutenue par le syndicat AFE. Les joueurs ont tenu malgré les menaces de la Ligue et la censure des diffuseurs DAZN et Movistar. Pour la déjouer, les 22 acteurs du match Celta-Sociedad ont donc fait une deuxième pause après 40 secondes de jeu. Un geste abondamment salué par les applaudissements du public de Balaídos, signe du rejet quasi unanime de ce projet. Même au sein du Barça, directement concerné par le match à Miami, le milieu de terrain Frenkie de Jong et l’entraîneur Hansi Flick ont critiqué l’idée de ce match, notamment parce qu’il impliquait un déplacement inutile de plus dans un calendrier déjà très chargé.
Dans son communiqué, LaLiga dit regretter une “opportunité historique” d’organiser un match de championnat à l’étranger. Joan Laporta, président du FC Barcelone, a aussi versé sa petite larme sur cette occasion manquée de renforcer l’image de son club sur le marché sportif américain. Si Tebas, Laporta et consorts poussent autant pour délocaliser des matchs, c’est qu’ils y voient un moyen essentiel d’accroître leurs revenus et de gonfler la valeur de droits TV qui souffrent encore de la comparaison avec ceux de la Premier League anglaise. Tebas a depuis longtemps l’objectif d’exporter au moins un match de Liga par saison. L’accord passé pour 2 milliards d’euros, sur 15 ans, avec Relevent Sports en 2018 s’inscrit dans cette perspective de promotion du championnat espagnol en Amérique du Nord.
En attendant les précisions de la FIFA
Le revers est d’autant plus dur à encaisser pour Tebas qu’il s’agit déjà de la quatrième tentative après Gérone-Barcelone en 2019, Villarreal–Atlético en 2020 et Barcelone–Atlético en décembre 2024. C’est une victoire morale pour les joueurs et les supporters opposés à ces délocalisations commerciales qui les dépossèdent un peu plus de leur passion, et les éloignent des clubs qu’ils aiment. Ceux de Villarreal peuvent se réjouir de retrouver cette affiche, un des sommets de la saison, au Stade de la Cerámica.
LaLiga va-t-elle renoncer pour autant à toute velléité de délocalisation de match aux États-Unis? Rien est moins sûr. Dans sa passe d’arme avec le Real Madrid qu’il accuse à mi-mots d’hypocrisie, Javier Tebas promet de continuer d’essayer. “Cette fois, nous étions tout près du but”, assure-t-il. Les adversaires irréconciliables du foot business vont devoir se tenir prêts à mener une future bataille. La FIFA doit encore, pour sa part, clarifier les règles en la matière. L’instance travail à un nouveau cadre concernant les délocalisations des matchs de championnat… sûrement avec l’idée d’ouvrir les vannes.

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