PSG: un tifo qui défie la criminalisation du soutien à la Palestine

Avant le match face à l’Atletico de Madrid en Ligue des Champions, le Virage Auteuil s’est distingué par un tifo en soutien à la libération de la Palestine. Un défi autant lancé à l’injonction à l’apolitisme des tribunes qu’aux volontés de criminaliser toute expression de solidarité envers le peuple palestinien.

Est-il possible, dans l’Hexagone, de soutenir la Palestine sans se voir accusé d’antisémitisme, voire de sympathies pour le Hamas, par les relais de la communication israélienne? Dans ce contexte rance où les appels à la paix sont taxés d’apologie du terrorisme et où une guerre génocidaire est présentée comme de la légitime défense, l’animation réalisée par les ultras parisiens n’a pas échappé à la foudre. En l’espèce, un tifo barré du slogan “Free Palestine”. On y voit la mosquée Al-Aqsa – symbole de la résistance palestinienne et cible régulière de raids de l’armée ou des milices extrémistes israéliennes – avec un combattant le visage recouvert d’un keffieh, ainsi qu’un enfant habillé du drapeau libanais. L’ensemble étant accompagnée d’une longue banderole “La guerre sur le terrain mais la paix dans le monde”.

L’habituel torrent de panique bourgeoise, dès qu’apparaît un drapeau palestinien, n’a pas mis beaucoup de temps à s’emballer. A commencer par celle du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, persuadé que “de tels messages sont proscrits par les règlements de l’UEFA”. Si les condamnations gouvernementales se sont bornées à viser le caractère “politique” du tifo, il n’y a pas besoin de sous-titre pour comprendre que ce qui a posé problème est surtout son caractère “palestinien”.

Toujours plus loin dans la surenchère et la menace répressive, il ajouté qu’il “faudra envisager d’interdire les tifos pour les clubs qui ne font pas respecter les règles”. L’instance européenne a préféré couper court et faire savoir qu’aucune procédure ne serait engagée contre le PSG, estimant que “la banderole déployée ne peut pas être considérée comme provocatrice ou insultante dans ce cas précis”. Suivant les recommandations du gouvernement, le club de la capitale a depuis durci le ton à l’égard des ultras et annoncé l’interdiction des tifos jusqu’à fin 2024.

Une proposition de loi scélérate

Parmi les cris d’orfraies provoqués par le tifo parisien, certains ont interprété les frontières formant le “i” de “Palestine” comme un appel voilé à la “destruction d’Israël”. Même si on ne peut pas évacuer l’existence, à la marge de certaines tendances pro-palestiniennes, de positionnements ambigus, cette accusation relève toujours de la même rhétorique malhonnête, au service du narratif de Tsahal. Cette carte illustre sans doute le slogan historique “De la rivière à la mer”, défendant dans les années 60/70 la création d’un état binational où Israéliens et Palestiniens, de toutes confessions, vivraient ensemble et en paix. Mais dans la séquence actuelle, les alliés de la politique raciste et coloniale de Netanyahou mènent une bataille intensive pour criminaliser toute critique de l’État israélien, à l’image de la proposition de loi scélérate déposée par la député Caroline Yadan, et signée par 91 députés.

En réponse aux polémiques, le Collectif Ultras Paris a publié une mise au point pour réaffirmer que ce tifo n’avait en aucun cas “vocation à diffuser un message de haine, bien au contraire”. La banderole explicite déployée est même plutôt “un appel à la paix entre les peuples”, tempère le collectif. Au delà des injonctions hypocrites à l’apolitisme du sport, les ultras parisiens ont un peu plus mis en lumière le traitement médiatique partial de ce qui se passe à Gaza, ne cessant d’en relativiser le martyr à base “de doubles standards et de compassions sélectives”, comme le démontrent les enquêtes d’Acrimed. Après plus d’un an de bombardements ininterrompus sur la bande de Gaza, des dizaines de milliers de civils palestiniens massacrés, il y en a qui trouvent encore l’audace de s’indigner de la solidarité avec un peuple opprimé. Ce soir-là, au Parc des Princes, les ultras nous ont indiqué le bon côté de l’Histoire.

Édito n°70

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