Une trentaine de clubs italiens qui se revendiquent du courant du calcio popolare, qui porte une alternative à la marchandisation du football, ont cosigné un communiqué pour marquer leur hostilité à la prochaine Coupe du monde au Qatar.
La Coupe du monde au Qatar est l’apothéose de ce que le football ne devrait jamais être: un énorme business construit avec le sang et l’exploitation des plus pauvres, ainsi qu’une scène de divertissement pour quelques spectateurs millionnaires.
Malgré les politiques de façade promues par la FIFA ces dernières années pour lutter contre les inégalités de genre, salariales et le racisme dans les stades, le choix d’organiser la Coupe du monde au Qatar révèle le vrai visage du football business.
Les droits de l’homme et les droits civiques sont relégués au second plan, donnant carte blanche à un pays qui:
– a violé à plusieurs reprises les droits fondamentaux des personnes issues de la communauté LGBTQ+ et des migrants, à tel point que la grande majorité des hôtels et des B&B ont déclaré qu’ils n’acceptaient pas les hôtes homosexuels;
– a exclu les femmes de presque tous les sports et événements sportifs, s’opposant ou empêchant leur participation;
– n’a pas défini de réglementation concernant les heures de travail et les salaires, en particulier pour les travailleurs migrants;
– a montré qu’il n’est pas un pays équipé pour un événement de cette ampleur, en lançant des constructions massives et écocides dans les zones désertiques du pays.Cette gigantesque opération financière et commerciale a eu pour conséquence de faire venir dans le pays des millions de travailleurs et travailleuses d’Asie et d’Afrique centrale (qui doivent souvent payer pour leur propre emploi) et de les contraindre à survivre dans un état d’esclavage.
L’exploitation, les températures dépassant largement les 45° et des horaires de travail supérieurs à 12 heures par jour ne sont que quelques-unes des causes qui ont entraîné la mort d’au moins 12 personnes par semaine. Les estimations d’Amnesty parlent de 6 500 travailleurs morts depuis 2010, mais d’autres sources décrivent des situations encore plus macabres, allant jusqu’à 15 000 victimes.
Les immenses bidonvilles qui s’étendent en dehors des centres urbains luxueux sont le théâtre de conditions de vie misérables. On parle de confiscation de papiers d’identité pour empêcher les gens de rentrer dans leur pays, de transformation de casernes de police en prisons et d’équipes de geôliers qui commettent des actes de violence quotidiens.
L’approbation tacite de la FIFA des pratiques infâmes en vigueur dans le pays reste embarrassante. En attestent notamment les déclarations d’Infantino: “Quand vous donnez un travail à quelqu’un, même dans des conditions difficiles, vous lui donnez de la dignité et de la fierté.” Ce n’est qu’une énième preuve de cette disgrâce.
Nous lançons cet appel comme une alerte unitaire de la scène italienne du calcio popolare. Convaincus que notre modèle sportif vise toujours la défense et la participation des opprimés, des plus vulnérables, des marginalisés. Notre raison d’être est donc lutter et d’attaquer les modèles de “sport” tels que ceux mis en œuvre au Qatar.
Connaissant le visage sanglant de l’ennemi, nous continuerons à proposer avec encore plus de conviction une alternative footballistique valable: des terrains de banlieue aux complexes sportifs où nous jouons, avec les laissés-pour-compte et les population marginalisées comme protagonistes en quête de délivrance.
Nous affirmons comme principe de base que le football a toujours été un canal de cohésion, d’intégration, un langage mondial qui ne peut et ne doit pas s’éloigner d’un centimètre des yeux et des pieds du peuple et des citoyens ordinaires.
Le football moderne atteint donc son apogée avec la Coupe du monde au Qatar: les riches propriétaires des sponsors, la télévision payante et les dirigeants de la FIFA s’en réjouissent avec désinvolture. Mais nous ne resterons pas sans rien faire, nous serons une épine dans leur pied, attaquant et frappant d’une part, et proposant une alternative d’autre part.
Toujours contre ce maudit football moderne: le football est au peuple, ou il n’est pas.
Un message politique fort reposant sur une vision sociale de ce sport !