Depuis octobre 2023, les forces israéliennes ont anéanti les infrastructures sportives de Gaza et tué plus 430 footballeurs palestiniens, dont au moins 105 enfants. Une manifestation a réuni plus de 10 000 personnes dans les rues d’Udine pour protester contre la tenue du match Italie-Israël et contre le “deux poids, deux mesures” des instances. La campagne “Show Israel the Red Card” recherche son second souffle.
Le dispositif policier était conséquent le 14 octobre dernier dans les rues d’Udine: plus de 1 000 policiers et militaires, hélicoptères et drones à l’appui, déployés pour empêcher la manifestation d’atteindre le Stadio Friuli où se jouait la rencontre comptant pour les qualifications du Mondial 2026. Des heurts ont éclaté en fin de parcours avec la police. Sur le terrain, Israël a été battue 3-0. Les manifestants se contenteront de ce résultat synonyme d’élimination dans la course à la Coupe du Monde. C’est une cartouche de moins dans le programme de sportwashing de l’État hébreu, mais il dispose de nombreux supports.
Le football israélien peut encore compter sur son dernier représentant en Ligue Europa: le Maccabi Tel-Aviv. Pour des raisons de sécurité, les autorités de Birmingham ont décidé de ne pas autoriser le déplacement des supporters du club, pour le match contre Aston Villa. Sa composante ultra – les Maccabi Fanatics – s’était faite remarquer l’an passé dans les débordements d’Amsterdam. Le gouvernement britannique s’est offusqué du “message antisémite” véhiculé par cette décision. Signe que les soutiens inconditionnels d’Israël ne desserrent pas les mâchoires.
Dans une trentaine de pays
Depuis de longs mois maintenant, des supporters, des clubs alternatifs, des collectifs et des médias appellent à l’exclusion des équipes israéliennes des compétitions internationales. Sans réussir à faire plier les instances. Le plan dit “de paix” de Donald Trump a déjà été violé à plusieurs reprises et Israël a encore abondamment bombardé ce qui tient encore debout à Gaza. Ce conflit n’a pas commencé le 7 octobre 2023 contrairement à ce que le récit dominant cherche à imposer, croire qu’il suffit d’un plan occidental salué par les monarchies de la région pour le résoudre, est illusoire.
A partir de février 2025, le collectif éditorial italien Calcio e Rivoluzione a œuvré à relayer la campagne “Show Israel the Red Card”, lancée à l’origine par la Green Brigade de Glasgow en lien avec le Lajee Celtic (projet basé dans le camp de réfugiés d’Aida en Cisjordanie). En Italie, le slogan a été repris avec énergie par quelques groupes de supporters, à Empoli, Pise, Pérouse ou Fasano. Plusieurs équipes de calcio popolare, dont les valeurs émancipatrices embrassent la cause palestinienne, ont aussi répondu à l’appel: l’Atletico San Lorenzo (Rome), la Polisportiva San Precario (Padoue), l’Athletic Brighela (Bergame) ou l’Aurora Vanchiglia (Turin), pour n’en citer que quelques unes.
“Cette coordination a ensuite été essentielle pour rendre possible la mobilisation d’Udine, accompagnée de rassemblements et manifestations simultanés dans 25 autres villes italiennes”, écrit le journaliste Valerio Moggia. Derrière ce slogan “Show Israel the Red Card”, le média AJ+ a recensé des actions de supporters dans une trentaine de pays en tout, du Pays Basque à l’Indonésie, en passant par le Maroc ou encore le Chili. Entre humanisme, antifascisme et anti-colonialisme, la campagne a permis de visibiliser, parfois de façon spectaculaire, la cause palestinienne dans les stades.
On perçoit aussi les limites d’un mode d’action qui n’a jusqu’ici pas permis de faire fléchir les instances. Malgré un rapport de force défavorable, la lutte pour que la Fédération israélienne (IFA) et ses équipes soient exclues des compétitions internationales, va continuer. La manifestation d’Udine a des airs d’apogée. Pour le collectif éditorial italien Calcio e Rivoluzione, un des organisateurs de la manifestation d’Udine, “L’intensité diminuera peut-être, mais l’intérêt pour la question ne devrait pas faiblir”. La nécessité de faire pression sur la fédération italienne de football (FIGC) pour un réel boycott des équipes israéliennes, est toujours d’actualité.
Quelles suites pour la mobilisation?
Comment faire plier la FIFA et l’UEFA? Les instances couvrent le génocide en permettant à Israël de rester à la table des nations sportives depuis plus de deux ans. Après avoir tout fait pour empêcher qu’un vote à ce sujet ait lieu, la direction de la FIFA oppose une fin de non-recevoir à la requête palestinienne, déposée en mai 2024, de suspendre la fédération israélienne de football (IFA), accusée de multiples infractions. La présence de clubs israéliens en territoire occupé et les multiples actes racistes des supporters sont pourtant des motifs de sanctions au regard des règlements de l’instance.
L’Italie se présente jusqu’ici comme un des épicentres de ce mouvement citoyen réclamant l’exclusion de l’IFA. Si une forme d’enlisement guette la mobilisation, pas question pour autant de s’arrêter. Quitte à se réinventer dans d’autres contextes que les matchs de football. “Nous le devons aux milliers de victimes des bombes israéliennes fournies par l’Occident. Nous le devons aux plus de 800 sportifs tués par Israël, aux milliers d’enfants gravement blessés et amputés, à qui l’on a même volé le droit de rêver”, déclare Calcio e Rivoluzione au média Insideover.
On a vu avec les interruptions répétées d’étapes durant la Vuelta en Espagne, visant l’équipe Israel-Premier Tech, que les protestations dépassent le seul cadre policé du football d’élite. “Les Jeux olympiques de Milan-Cortina seront sans aucun doute une étape tout aussi importante, mais nous ne comptons pas attendre seulement les grands événements sportifs”, concluent les activistes de Calcio e Rivoluzione, combattifs.

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