
L’annonce par la Fédération Palestinienne de Football (PFA) de la mort de Suleiman al-Obeid, a été massivement relayée par les médias internationaux. Surnommé le “Pelé palestinien”, il a été tué le 6 août dernier par l’armée israélienne sur un point de ravitaillement humanitaire, à Khan Younès au sud de Gaza.
C’est désormais une scène classique qui s’ajoute à l’horreur du génocide en cours dans la bande de Gaza: des civils palestiniens, qui attendent une aide humanitaire distribuée au compte-goutte, se font tirer dessus par les soldats israéliens. On estime à plus de 1 300 le nombre de Palestiniens tués aux abords des points de distribution, dont la logistique est gérée par la Gaza Humanitarian Foundation, organisation sous contrôle israélo-américain.
C’est comme ça que le footballeur Suleiman al-Obeid, âgé de 41 ans, a été abattu. Son nom allonge la liste des footballeurs palestiniens assassinés ou morts de faim. Il sont plus de 420 à avoir perdu la vie, dont un quart d’enfants. Et plus de 660 sportifs depuis le début des massacres. La PFA a rendu hommage au buteur prolifique qui compte plus de 100 buts en carrière, “faisant de lui l’une des plus grandes stars du football palestinien”.
“Tout le monde l’aimait et l’appréciait”, a déclaré à The Athletic son ancien coéquipier Mohammed Ali Mohana. Pour Ibrahim Al-Amur, autre footballeur qui a côtoyé Suleiman au Gaza Sports Club, “il était un des dix meilleurs joueurs de l’histoire de la Palestine”.
Gazaoui de naissance, Suleiman a commencé sa carrière au Khadamat al-Shati, avant de partir jouer en Cisjordanie occupée au Markaz Shabab al-Am’ari, puis de revenir dans l’enclave, au Gaza SC entre 2014 et 2016. Depuis 2016 et jusqu’à l’arrêt des compétitions suite au 7 octobre, il était revenu dans son premier club à Al-Shati, camp de réfugié situé dans le nord de la bande de Gaza. Interrogé en septembre 2023, il disait “ne pas penser à la retraite”. Son excellente condition physique lui a permis de continuer à jouer dans l’élite malgré son âge.
Il s’est affirmé comme un des cadres de la sélection palestinienne entre 2007 et 2013, dans les conditions de l’oppression coloniale qu’on connaît. Il a porté le maillot de la sélection à 24 reprises, pour deux buts. Il est considéré comme un des joueurs les plus talentueux de sa génération, ce qui lui a valu les surnoms flatteurs de “Pelé palestinien” ou encore de “Thierry Henry”.
Les médias rappellent notamment sa magnifique volée acrobatique contre le Yémen au championnat ouest-asiatique des nations, disputé en 2010 en Jordanie. “Probablement le plus beau but de l’histoire de l’équipe de Palestine”, selon son ex-coéquipier et ami, le gardien de but Ramzi Saleh.
La PFA alerte depuis longtemps les instances sur la situation, notamment dans les territoires occupés illégalement en Cisjordanie. La fédération israélienne (IFA) y a officiellement reconnu plusieurs clubs, enfreignant l’article 72 des statuts de la FIFA selon lequel “les associations membres et leurs clubs ne sont pas habilitées à jouer sur le territoire d’une autre association membre sans l’accord de celle-ci”. L’IFA jouit d’une impunité qui a l’odeur de la complicité occidentale avec l’apartheid et la colonisation.
Dans un monde normal, comme nous l’avons déjà écrit, la FIFA et l’UEFA auraient donc dû, depuis bien longtemps, prendre la décision d’exclure la fédération israélienne et ses équipes de toutes leurs compétitions. Les instances préfèrent fermer les yeux sur ce génocide qui a déjà fait 62 000 morts, plus de 155 000 blessés et laisse une population en proie à la famine, plutôt que d’utiliser un de ses levier et sanctionner le football colonialiste israélien.
L’UEFA a prétendu rendre hommage à Suleiman al-Obeid, saluant le “Pelé palestinien” mais sans jamais mentionner que c’est l’armée israélienne qui l’avait tué. Une omission suffisamment abjecte pour voir Mohamed Salah réagir. L’attaquant égyptien de Liverpool a interpellé l’instance européenne et mis en lumière cette hypocrisie, via ses réseaux sociaux: “Pouvez-nous dire comment il est mort, où et pourquoi?”. Pour Suleiman, et tous les autres, le pressing doit continuer.
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