Attaquant d’Aston Villa de 1991 à 1995, Dalian Atkinson a laissé un bon souvenir du côté de Villa Park, à Birmingham. En témoigne l’hommage rendu par les fans et le club au lendemain de sa mort, tué par la police de quatre décharges de pistolet Taser, à l’âge de 48 ans, là même où il a commencé à jouer au football avec ses frères et ses copains.
Que s’est-il passé la nuit du 14 au 15 août 2016, devant le domicile du père de Dalian Atkinson, à Telford? Selon les récits, l’ex-joueur professionnel menaçait de tuer son père, âgé de 85 ans. Une description préparant le terrain à la justification du recours au Taser pour le “neutraliser”. Ce qui, en langage policier, signifie “abattre”. La succession de décharges électriques dans son corps ont provoqué un arrêt cardiaque. L’efficacité de ces fameuses armes à “létalité réduite”, selon la novlangue propre à la propagande policière. Les équipes médicales dépêchées sur les lieux n’ont pas réussi à réanimer Dalian, déclaré mort à 3 heures du matin. De son côté, la police procède à une enquête interne censée définir s’il y a matière ou non à poursuivre judiciairement les trois policiers de West Mercia impliqués dans la mort de l’ex joueur d’Aston Villa. Comme en France, ces enquêtes sont plus un gadget servant à apaiser les éventuelles colères sociales qu’une réelle garantie contre l’impunité policière. Elles prennent d’ailleurs bien leur temps avant de rendre leurs conclusions. Les proches des victimes sont rarement dupes. Malgré tout, les frères ainés de Dalian, Keyron et Paul, réclament “Justice”. Dès le 17 septembre 2016, soit un mois après la mort de leur frère, une marche a été organisée à Telford dans cet objectif.
Le but de l’année de la saison 92/93
Kenroy explique que sa famille n’a pas été autorisée à voir le corps de Dalian avant la fin de l’enquête. Confisqué par la police pour une investigation concernant sa propre action. Cette rétention du corps qui traîne en longueur, donne un peu plus de poids aux témoignages faisant état de plusieurs coups violents portés à Dalian par les policiers, en plus des tirs de Taser. Ses proches craignent alors que la police ne maquille les raisons de sa mort pour se disculper de tout “dérapage”. « Il n’était pas dans son état normal » raconte Keyron, mais selon lui rien ne peut justifier cette violence disproportionnée qui a conduit à la mort de son frère.
Retourné vivre dans son Shropeshire natal à la fin de sa carrière en 2001, Dalian Atkinson connut, comme beaucoup de footballeurs, des difficultés à faire face à sa nouvelle situation. Il tenta de se reconvertir comme agent de joueurs, mais ce fut un échec. Tout cela l’avait profondément atteint, lui qui avait déjà les plus grandes peines à se remettre du décès de sa mère en 1999.
Formé à Ipswich, c’est surtout le club d’Aston Villa qu’il aura marqué de son empreinte. Les fans n’ont pas oublié ce joueur qui scora à 38 reprises en 114 matchs, dont un but mémorable contre Wimbledon en octobre 92, élu but de l’année par l’émission Match of The Day. Sous le crachin de Selhurst Park, un rush solitaire lancé depuis son propre camp et conclu par un lob délicat à l’entrée des 16 mètres. La célébration avec un supporter sorti de la tribune avec son parapluie est aussi restée célèbre.
Le lendemain de la mort de Dalian Atkinson, Aston Villa reçoit Huddersfield. De nombreuses banderoles d’hommage garnissent les tribunes. A la 10e minute, le stade applaudit sans discontinuer Dalian Atkinson dont la photo apparaît sur l’écran géant. Son homonyme, l’entraîneur Ron Atkinson, qui l’a eu sous ses ordres à Aston Villa, et avec qui il remporta la Cup en 94 face à Manchester United, déclara au Birmingham Mail: « Sa mort est une immense tragédie. C’était vraiment un joueur très populaire auprès de ses coéquipiers. Un gars très généreux – peut-être trop parfois, à son détriment. Quelqu’un de bien. Il avait aussi des capacités énormes. Je n’ai jamais douté du fait que je pouvais compter sur lui lors des grands rendez-vous.»
Ses funérailles n’eurent lieu que le 19 novembre 2016, au crematorium de Telford. Plus de trois mois après sa mort. Plusieurs de ses anciens coéquipiers, Ugo Ehiogu, Steve Staunton, Ian Taylor, Tommy Johnson, Gary Charles ainsi que le coach Brian Little, étaient présents pour lui dire au revoir.
Les policiers condamnés
Aux dernières nouvelles, l’enquête aurait été retardée par les gros manquements de l’institut privé chargé des analyses médico-légales. A l’été 2018, le rapport de l’Independant Office for Police Conduct sur la mort de Dalian a été rendu, concluant à des fautes graves de la part de deux des trois policiers impliqués. La Justice qui déclarait poursuivre les investigations qu’aucune décision concernant la mise en examen ou de charges retenues à l’encontre des policiers n’avait été prise. L’abnégation des proches de Dalian face à cette lenteur judiciaire, pour que “justice” lui soit rendue, a fini par payer.
En novembre 2019, le policier Benjamin Monk a été inculpé pour meurtre, et sa collègue Ellen Bettley-Smith pour coups et blessures. Initialement prévu en juillet 2020 à Birmingham, leur procès a été reporté en raison des restrictions liées Covid-19. Reprogrammé au 12 avril 2021, il a rendu son verdict après plusieurs semaines d’audience, condamnant Benjamin Monk pour “homicide involontaire” à huit ans de prison. Un verdict jugé trop clément qui a provoqué les protestations d’une partie de la communauté locale.
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