Depuis 2010, les gouvernements occidentaux parlent de “crise migratoire” pour décrire ces millions d’hommes et de femmes qui fuient la guerre ou la misère. La militarisation des frontières de l’Europe s’est resserée pour maintenir à distance ces exilés. Face à ce repli nationaliste, un certain nombre de groupes de supporters défendant des valeurs sociales, ont pris position en faveur de l’accueil des migrants. Voici un petit florilège non exhaustif.
Celtic Glasgow (Ecosse / Première Ligue)
Le Celtic Glasgow est le club historique de la communauté irlandaise d’Ecosse. L’opposition avec son rival des Glasgow Rangers qui affiche sa fidélité à la couronne d’Angleterre, a une coloration éminemment politique. Si celle-ci est souvent résumée à une rivalité religieuse entre les catholiques du Celtic et les protestants des Rangers, elle va bien plus loin. Les supporters de la Green Brigade qui dénoncent régulièrement la répression des supporters, portent des valeurs sociales et anticoloniales au nom desquelles ils se solidarisent des Palestiniens, ou encore rendent hommage au combattant de l’IRA Bobby Sands. Ils aiment à rappeler que leur club a été créé par des immigrés. Défendre l’accueil des migrants est un acte de cohérence avec l’histoire de leur club.
St. Pauli (Allemagne / 2.Bundesliga)
Rien d’étonnant à retrouver les supporters de Sankt-Pauli FC, club incarnant le football “de gauche” avec une identité antifasciste assumée, parmi ceux ayant affirmé leur soutien sans faille aux migrants. Pour ce club d’un quartier alternatif, connu pour ses squats, de la ville portuaire d’Hambourg, ces valeurs sociales font sens. La réputation et la popularité du club et de ses ultras ont largement dépassé les frontières du pays comme le Jolly Roger des pirates arboré comme emblème. Si le club garde le fil avec ses supporters c’est aussi parce qu’il s’engage en tant qu’institution comme lorsqu’il aide au développement du F.C Lampedusa Hambourg, club de réfugiés ou encore lorsqu’il ouvre les portes du stade Millerntor à des militants anti-G20 lors des manifestations de juillet 2017.
AEK Athènes (Grèce / Superligue)
Club fondé par les réfugiés grecs d’Asie Mineure en 1924, quelques mois après la défaite de la Grèce lors de la guerre avec la Turquie d’Ataturk. Cette défait qui prit le nom de “Grande catastrophe”, provoqua le rapatriement forcé de plus d’un million de personnes en Grèce. Ces réfugiés à l’identité singulière durent affronter l’hostilité et le rejet. Cette communauté fonda deux des clubs les plus importants du pays aujourd’hui: le PAOK à Thessalonique et l’AEK à Athènes. Leurs fans, organisés au sein des Originals 21, sont connus pour leur antifascisme. C’est l’un des principaux groupes du pays. Ils sont restés nombreux et puissants malgré la démolition en 2003 de leur stade historique de Nikos Goumas touché par le tremblement de terre de 1999 ou encore les déboires sportifs de leur équipe marqués par la première relégation du club en 80 ans d’histoire lors de la saison 2012/2013.
US Città di Fasano (Italie / Série D)
Aujourd’hui en Série D, le club de Fasano n’a jamais évolué plus haut que le quatrième niveau du football italien. Il fait néanmoins partie de ces clubs des divisions inférieures pouvant s’appuyer sur des ultras très actifs, et ce depuis 1988 et la naissance des Allentati qui occupent depuis 30 ans la Curva Sud du petit stade Vito Curlo. Le groupe a toujours défendu le rôle social des ultras et la transmission de valeurs de solidarité et d’antiracisme, s’élevant contre le business et la répression propre au football moderne. Depuis 2009, un nouveau groupe, les Fasano Ultras, s’est joint aux Allentati dans la tribune. Les Allentati organisent aussi depuis l’été 2014 un tournoi de football populaire qui est aussi l’occasion de rendre hommage à leurs membres disparus en invitant les groupes ultras avec qui ils sont jumelés comme les Ingrifati de Pérouse ou avec qui ils entretiennent des amitiés comme les Desperados d’Empoli ou les Gladiators de Nîmes. Ajoutons que depuis décembre 2015, le projet d’actionnariat populaire Il Fasano Siamo Noi veille au maintien des valeurs sociales de leur club.
Clapton F.C (Angleterre / Essex Senior League / 9e div.)
Après six années d’existence, les Clapton Ultras ont décidé au début du mois de septembre 2018 de mettre un terme à leurs activité. Une réelle pour le monde des ultras que la disparition de ce groupe antifasciste qui ne manquait jamais une occasion de rendre hommage aux combattants d’ici et d’ailleurs. De leurs glorieux ainés ayant participé à la Bataille de Cable Street contre les fascistes d’Oswald Mosley en 1936 aux combattants progressistes faisant face à Daech et à l’armée turque dans le Rojava kurde. Leur tribune rappelait à chaque match que les migrants étaient “les bienvenus”. Mais suite à un projet vénal du président du club de mettre en vente le stade historique du club, de nombreux supporters ont fait leurs valises pour créer le Clapton Community FC plus conforme à leurs valeurs, et repartir en 13e division.
Werder Brême (Allemagne / Bundesliga)
Dans le contexte allemand de l’inquiétante montée en puissance du mouvement d’extrême-droite PEGIDA (acronyme allemand pour “Patriotes européens contre l’islamisation de l’Occident”), un vaste élan citoyenniste en faveur de l’accueil des réfugiés a vu le jour, rallié derrière un mot d’ordre simple: “Refugees Welcome!” Un certain nombre de tribunes aux positions de gauche revendiquées ont repris ce mot d’ordre, notamment celle du Werder Brême, dont le groupe ultras “Caillera”, né en 2012 à la suite de l’ancien groupe “Racailles Vertes”. Ce groupe qui se définit comme antifasciste, anti-nationaliste, contre l’antisémitisme et l’homophobie s’était déjà distingué en février 2017 pour avoir exhibé une banderole “Justice pour Théo”, du nom de ce jeune homme originaire d’Aulnay-sous-Bois victime de graves violences policières.
Parmi les autres supporters ayant pris position en faveur des migrants citons encore ceux du Bayern Munich, du Borussia Dortmund, des Bohemians de Dublin, du Deportivo Alavés, de l’Athletic Bilbao, du Rayo Vallecano, de Pérouse, d’Empoli…
UB 87 également :
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