Deniz Undav face à une vague de haine anti-kurde

(©Selim Sudheimer/Getty Images)

Le match Fenerbahce-Stuttgart à Kadıköy en Europa League a été marqué par les insultes anti-kurdes qui ont visé l’international allemand Deniz Undav passé par l’Union Saint-Gilloise et Brighton & Hove Albion avant de revenir en Allemagne.

Les insultes auraient commencé à fuser après une brève altercation sur le terrain avec İsmail Yüksek, milieu de Fenerbahçe. Interrogé par la chaîne allemande RTL+ au sujet de ces tensions pendant le match, Undav a préféré relativiser l’incident: “Le public a simplement sifflé et hué. Ce genre de choses a tendance à me motiver, moi et mes coéquipiers, mais aujourd’hui, nous n’avons pas réussi à transformer cela en victoire.”

Sur les réseaux sociaux, les insultes à caractère raciste visant l’attaquant germano-kurde se sont multipliées. Et, au cours d’une émission de télé, Serkan Balcı – ancien international turc, passé par Fenerbahçe – a également insulté publiquement Undav. “Tu es footballeur, toi, Deniz? T’es un salaud, mec! Si tu avais un minimum d’honneur, tu ne serais même pas venu ici. Remercie-les de ne pas t’avoir cassé la gueule. Fils de salaud!” Il a par la suite repris la parole pour assurer qu’il n’avait rien contre les Kurdes.

Dans de nombreux commentaires, Undav a été traité de “terroriste” ou de “traître”, souvent associés à des stéréotypes anti-kurdes et anti-yézidis. Face à ce cyber-harcèlement raciste, le barreau de Hakkâri a annoncé déposer une plainte “contre le commentateur sportif Serkan Balcı, ainsi que contre les autres commentateurs et utilisateurs de Twitter ayant tenu des propos insultants et haineux à l’encontre du footballeur kurde Deniz Undav, pour incitation à la haine et à l’hostilité ainsi que pour discrimination.”

L’ultra-nationalisme turc à la manœuvre

Kurde d’origine (sa famille vient de Viranşehir), Deniz Undav évolue au VfB Stuttgart depuis 2024. Il a reçu de nombreux messages de soutien. “Ça m’a fait beaucoup de bien! Merci pour le soutien incroyable de ces derniers jours”, a-t-il publié en allemand sur ses réseaux sociaux. Eligible à la sélection nationale turque, il n’a jamais hésité un seul instant à opter pour la Nationalmannschaft. “J’ai toujours su que je voulais jouer uniquement pour l’Allemagne. J’ai grandi ici. […] J’aurais pu jouer pour la Turquie, mais si j’avais raté un seul match, vous auriez vu à quel point j’aurais été critiqué.”

Le député de gauche Serhat Eren, membre du DEM Parti et élu de Diyarbakır, a déposé une question parlementaire au ministre de la Justice au sujet du racisme subi par le joueur. Eren a déclaré que les insultes proférées en direct par Serkan Balcı, ainsi que la propagation de messages haineux sur les réseaux sociaux, montraient comment le rôle des médias dans l’hostilité anti-kurde. Selon lui, l’incident “révèle une atmosphère dangereuse visant l’identité kurde dans son ensemble”.

En Allemagne, certaines voix alertent sur la présence croissante de groupes d’extrême droite turcs autour du football, en particulier les Loups Gris, milice néo-fasciste associée – via le MHP (“Parti d’action nationaliste”) – à la coalition électorale formée autour de l’AKP de Recep Tayyip Erdoğan. Leur salut apparaîtrait régulièrement lors de matchs ou tournois, sans réaction des ligues et fédérations.

Les précédents Deniz Naki et Amedspor

Deniz Undav subit ce type d’insultes depuis plusieurs mois selon le Centre d’information sur le racisme anti-kurde (IAKR) et le Conseil central des droits humains des Kurdes en Allemagne (ZMRK). Un phénomène de plus en plus notable depuis qu’il s’est publiquement identifié comme Kurde yézidi. Deniz Undav connaît, à son niveau, le sort réservé par l’extrême droite turque à celles et ceux qui affirment un peu trop fort leur identité kurde.

Le football turc est un vecteur connu ces discours haineux. On a pu le vérifier à plusieurs reprises avec le soutien des membres de l’équipe nationale à la guerre menée au Rojava. Merih Demiral avait même été suspendu deux matchs par l’UEFA pour avoir fait le signe de Loups Gris. Les milieux ultra-nationalistes turcs concentrent leurs attaques, tant verbales que physiques, sur certaines cibles iconiques. En témoigne le traitement raciste réservé au club d’Amedspor ou à Deniz Naki.

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