L’Atletico San Lorenzo en ordre de bataille pour sauver son terrain

La résistance s’organise du côté de San Lorenzo pour sauver le terrain historique du Campo Benedetto XV. L’équipe romaine de calcio popolare qui évolue en 2a Categoria montre par sa mobilisation qu’elle est bien plus qu’un simple club, mais un acteur social de premier plan, impliqué dans la vie du quartier.

Le 6 octobre dernier, les jeunes de l’Atletico San Lorenzo – du nom du quartier populaire de Rome où le club a vu le jour – ont eu la désagréable surprise de trouver en travers du terrain à 11 où ils ont l’habitude de s’entraîner, des barrières métalliques installées en catimini et annonçant un chantier imminent, tout comme la disparition des buts.

Même si les joueurs continuent de s’entraîner et s’adaptent en pratiquant une sorte de tennis-ballon des deux côtés de ces barrières, l’urgence est de bloquer toutes velléités de travaux. Car il y a assez peu de suspense sur les intentions des propriétaires du Campo Benedetto XV de réaménager sans trop attendre l’espace. Leur objectif: en faire un complexe privatisé avec à la clé des terrains de padel et un parking de 100 places. Une bétonisation qui annonce de gros changements pour l’Atletico San Lorenzo autant que pour les habitants du quartier qui l’entoure. Mais les membres du club sont déterminés à démontrer qu’il existe d’autres pistes.

Ce que nous avons en tête, c’est un projet inclusif qui conserve le terrain à 11, mais aménagé de telle sorte qu’il puisse y avoir des créneaux pour ceux qui voudraient le louer. Cela permettrait au propriétaire de générer des revenus, mais sans faire disparaître ce qui est aussi un parc et un lieu de rencontre pour les familles du quartier.” assure Andrea, l’un des fondateurs de l’Atlético San Lorenzo, au média Roma Today.

Menace sur l’école populaire de foot

L’installation du chantier a mis le quartier sur le pied de guerre pour maintenir en l’état le seul terrain destiné aux adolescents de San Lorenzo. Mais au-delà de l’accès libre aux installations sportive, cette résistance populaire est une défense du quartier contre sa gentrification rampante. “Parce qu’ici nous vivons depuis des années une spéculation qui ne laisse rien à ceux qui vivent à San Lorenzo“. L’opposition au réaménagement du complexe ne date pas d’aujourd’hui. Il y a trois ans déjà, l’Atletico San Lorenzo adressait au propriétaire une pétition, intitulée “Pas touche au terrain, le sport est un droit, les installations sportives sont pour tout le monde”. La privatisation progressive et l’accès limité aux terrains en soirée y étaient déjà dénoncées. Ils avaient notamment reçu le soutien de leurs amis londoniens du Clapton CFC.

Projet de réaménagement du Campo Benedetto XV. Le “gros” du chantier vise en effet le terrain à 11 et les espaces verts autour, mais des travaux sont aussi prévus à d’autres endroits du complexe.

Pour mieux comprendre la situation, deux trois mots sur les propriétaires du Campo Benedetto XV sont nécessaires. Le terrain appartient depuis 1926 à la Fondation Cavalieri di Colombo. Une organisation religieuse qui, dans les années 20 et avec l’appui du Vatican et du Pape Benoît XV, a construit une série d’installations sportives dans différents quartiers de la capitale comme à Flaminio, à Valle Giulia, à Primavalle ou à San Pietro, pour être gratuitement mises à disposition de tous les jeunes via les paroisses, les écoles ou encore les colonies de vacances. Alors que cette mission d’intérêt public a été remplie pendant quasiment un siècle, ce n’est plus trop le cas ces derniers temps. Défendant des valeurs de sport populaire, compatibles avec l’esprit initial du “sport per tutte e tutti” des Cavalieri di Colombo, l’Atletico San Lorenzo n’a posé ses crampons au Campo Benedetto XV qu’en 2013, date à laquelle le club a été créé. D’abord avec une section de football, avant de se développer comme un véritable club omnisports de plus de 200 licenciés dans des disciplines comme le basket-ball masculin et féminin, ou encore le volley mixte. Mais le fleuron et la fierté du club reste son “école populaire de football” proposant une activité foot à plus de cent jeunes âgés de 6 à 16 ans, soit cinq équipes participant aux championnats officiels de leur catégorie d’âge. Justement celles et ceux qui sont aujourd’hui le plus menacés par le projet.

Proposition alternative de l’Atletico San Lorenzo

Projet alternatif présenté par l’Atletico San Lorenzo, avec maintien des espaces verts et du terrain à 11, ici modulable en trois terrains de Foot à 5. Mais, en effet, pas de terrain de padel.

Il est vrai que le terrain à 11 est vétuste et même en état de “semi-abandon” selon l’Atletico San Lorenzo et que son démantèlement est dans les tiroirs depuis un moment. Malgré tout, le club s’est toujours opposé à la transformation de ce terrain de football à 11 – un des derniers accessibles dans le centre de Rome – estimant aussi qu’il constitue un témoignage historique majeur. “Ce que nous demandons, c’est l’enlèvement immédiat des barrières, qui peuvent aussi être dangereuses, tant que les discussions entre les différentes parties se poursuivent. Nous avons présenté un projet, nous attendons qu’un lieu si important pour le quartier continue d’exister“, ajoute Andrea.

Ce sont deux conceptions qui s’opposent. Le club populaire, déjà investi en faveur de plusieurs causes sociales et humanistes, défend l’accès libre et gratuit aux installations sportives comme un service public quand les propriétaire cherchent à rentabiliser le complexe. L’Atletico San Lorenzo a en effet planché sans relâche sur un projet alternatif privilégiant une rénovation et une mise aux normes de ce terrain à 11, en imaginant une installation modulable pouvant se transformer en plusieurs terrains de five sur sa largeur. Plusieurs élus municipaux ont aussi déjà fait part de leur opposition à ce réaménagement. Une lettre a même été écrite au Pape François. La balle est dans le camp des propriétaires.

 

 

 

 

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