A Vallecas, le conflit social autour de l’augmentation du prix des abonnements a pris la forme d’une grève très suivie de l’assistance pour l’ouverture du championnat de 2e division. Face à une direction arc-boutée sur ses positions, les associations de fans du Rayo sont bien décidées à ne rien céder. Prochaine étape, le 1er septembre pour la réception de La Corogne pour l’acte 2 de la grève avec une manifestation aux abords du stade.
Avec la hausse du prix des abonnements, le président Raúl Martín Presa a peut-être enclenché une révolte qu’il n’arrivera pas à éteindre s’il ne fait pas très vite marche arrière. Après l’échec des discussions où il a opposé une fin de non-recevoir aux associations de supporters, celles-ci sont passés à la vitesse supérieure : la grève. Dès lors, des affichettes appelaient à ne pas entrer dans le stade pour la reprise du championnat. Les supporters rejettent cette hausse du prix, notamment concernant les abonnements handicapés et ceux des jeunes. Ils remettent aussi en cause aussi l’instauration d’un abonnement séparé pour suivre l’équipe féminine, mesure qui la pénalise. La Plataforma ADRV, regroupant la plupart des associations de fans rayistas, avait largement communiqué l’appel à la grève. Pour le premier match face au CD Mirandés, la huelga de asistencia a été massivement suivie. La suite est prévue le dimanche 1er septembre, pour la réception de La Corogne, avec une manifestation aux abords du stade Vallecas et la reconduction de la grève.
L’opération « tribunes vides », comme celle réalisée à Vallecas, crée un autre type de rapport de force que les grèves partielles ou totales d’encouragements, banderoles ou envahissements de terrain où les supporters protestent à l’intérieur du stade. Samedi dernier à 21h, au moment où les joueurs faisaient leur entrée sur le terrain, le stade du Rayo sonnait creux, et ça s’est entendu de loin. Le virage derrière les buts où prennent traditionnellement place les Bukaneros était quasiment vide. Avec seulement 6038 spectateurs présents, Vallecas a connu sa pire affluence de la décennie pour un match d’ouverture. D’ordinaire une tribune vide ou clairsemée fait plutôt peine à voir. Mais, cette fois-ci, c’était beau. La grève a éclaté aux yeux de tous. Et les revendications qui la motivent en ont résonnéde plus belle.
Un slogan ouvrier dit « Le patron a besoin de toi, tu n’as pas besoin de lui ». On pourrait presque l’appliquer au football et à la situation actuelle. Au Rayo, club historique de la banlieue prolétaire de Madrid, la référence à la classe ouvrière est loin d’être décalée. Bien sûr, on peut penser que les principaux producteurs de « spectacle » ce sont les joueurs sans qui il n’y aurait pas de match du tout. Mais les images des tribunes désertes samedi dernier à Vallecas montrent toute l’importance de l’action des supporters sans qui cette production sort affaiblie voire dégradée. En fait, les deux sont indispensables.
Le président Presa doit se sentir bien seul dans sa croisade contre les ultras. Les déclarations du coach Paco Jemez et de quelques joueurs sur le préjudice causé par l’absence des ultras laisse entrevoir l’isolement de la direction. Paco Jemez dit même « respecter » la décision des supporters, qu’il apprécie, de boycotter le match. Même les héritiers de la fondatrice du Rayo, Doña Prudencia Priego, se sont fendus d’une lettre ouverte adressée à Presa, en forme d’appel vibrant à renouer avec les valeurs originelles du club : l’humilité et la solidarité.
Les tags de supporters sur les murs du stade Vallecas proclamant « Le Rayo, c’est nous ! » sont loin d’être des paroles en l’air. Les supporters sont les réels garants de ces valeurs historiques attaquées à travers la hausse du prix des abonnements. Mais le club est traversé par un conflit social, depuis de longs mois, contre la gestion du club par Presa, actionnaire tout puissant du club à 98 %. C’est ce qui le laisse peut-être se croire intouchable et autorisé à liquider l’héritage populaire du Rayo. Bill Shankly, le mythique coach de Liverpool, disait qu’un club de football reposait sur une « Sainte-Trinité » : les joueurs, l’entraîneur et les supporters. Il ajoutait, « Les présidents n’ont rien à voir là-dedans, ils sont juste bons à signer les chèques ». Le mouvement des supporters rayistas vient rappeler cette vérité à Presa : posséder le club ne signifiera jamais qu’il lui appartient.
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