Les supporters chiliens font une nouvelle fois reculer les instances

Deux rencontres étaient au programme ce vendredi soir pour la reprise du championnat de Première Division au Chili après plus d’un mois d’interruption. Comme promis par différentes barras bravas, la reprise du championnat chilien a été d’emblée perturbée. L’ANFP s’est vue contrainte d’ajourner une nouvelle fois la reprise du championnat.

Différents groupes de supporters avaient déclaré s’opposer au retour à la normalité du football professionnel tant que les revendications des manifestants n’auraient pas été satisfaites. La révolte sociale du peuple chilien contre la vie chère ont jusqu’ici contraint les autorités à suspendre le football professionnel au pays. Mais depuis plusieurs semaines, la Ligue professionnelle (ANFP), alliée du président Piñera, pousse à reprendre. L’enjeu pour les capitalistes est double: relancer la machine économique du football tout en espérant calmer la révolte. L’ANFP a recemment reçu l’aval du syndicat des joueurs (SiFUP). Unies, plusieurs barras bravas, qui avaient annoncé qu’elles n’étaient pas dupes de la manoeuvre, avaient appelé à diverses actions de blocage et de boycott en cas de tentatives de reprise.

Unión La Calera – Deportes Iquique, le crash test

L’équipe de La Calera et sa pensée aux nombreux mutilés des manifestations.

Si Cobresal – Unión Española, une des deux rencontres programmées, est allé à son terme, ce n’est pas le cas de la rencontre opposant l’Unión La Calera à Deportes Iquique. Face à des tribunes quasiment vides, le championnat chilien pensait bien reprendre ses droits. Toutefois, le refus de la mairie de La Calera, en soutien aux manifestations qui secouent le pays, de mettre à disposition l’enceinte habituelle des Cementeros, a été un premier camouflet pour l’ANFP. L’instance a été obligée, à quelques heures du match, de se rabattre en urgence sur l’estadio Bicentenario de la Florida, dans la capitale Santiago, où évolue habituellement l’Audax Italiano. D’où les gradins sans âme qui vive et les airs de huis clos.

Symboliquement, les joueurs des deux équipes, qui reprennent donc le chemin des terrain contre l’avis des principales barras bravas du pays, avaient tenu à montrer d’une manière où d’une autre qu’ils restaient du côté des manifestants: minute de silence pour les 23 manifestants tués par les carabiniers depuis le 17 octobre, banderole “Pour un Chili plus juste” et hommage aux mutilés par les armes de la police, en posant la main sur l’oeil gauche lors de la photo d’avant-match. Largement insuffisant pour les supporters et les manifestants dont plusieurs dizaines ont provoqué l’interruption du match à la 67e minute, après avoir forcé l’entrée du stade.

L’ANFP recule une nouvelle fois

L’action de sabotage du match, dispersée après quelques minutes par la police, a été attribuée à des supporters de Colo-Colo, dont le principal groupe, La Garra Blanca, a mis en garde l’ANFP et les dirigeants de leur club contre toute tentative de faire reprendre le football professionnel les manifestants n’auraient pas été entendus sur les améliorations immédiates de leurs conditions de vie et les changements sociétaux qu’ils exigent. Des fans d’Audax Italiano étaient aussi présents. Le groupe des Antifascistes de la Garra Blanca a rappelé après cette irruption que tous les groupes de supporters ont bien identifié “l’ennemi de toujours, ceux qui ont abusé depuis 40 ans et aujourd’hui cherchent à revenir à la normalité pour que continue ce système qui privilégie une poignée de millionaires.”

Alors que le SiFUP et l’ANFP s’étaient mis d’accord sur la reprise il y a quelques jours, suite à l’interruption Unión La Calera à Deportes Iquique, le syndicat a demandé aux joueurs de ne pas se présenter aux rencontres du lendemain. Face à la menace et à la détermination des supporters des principaux clubs, de Colo-Colo, de Universidad Católica ou encore Santiago Wanderers, et l’hypothèse que ce qui s’est passé au Bicentenario se reproduise puissance 1000, l’ANFP n’a pas eu d’autres choix que de reporter l’ensemble des rencontres restantes de cette 26e journée de championnat. C’est une nouvelle manche remportée par les supporters dans le bras de fer qui les oppose aux instances du football pro, et derrière au régime de Piñera.

2 Trackbacks / Pingbacks

  1. Chroniques chiliennes : des nouvelles de la révolte que le foot n’a pas pu dompter – Dialectik Football
  2. Dialectik Football

Leave a Reply

Your email address will not be published.


*