Le média anglophone Balkan Insight rapporte l’interruption temporaire du match de dimanche dernier entre le Novi Pazar FC et le Partizan Belgrade, en Serbie, suite aux slogans des supporters ultra-nationalistes du Partizan. Chronique de la banalité de tensions identitaires pas prêtes de cicatriser dans les Balkans.
Pour la 4e journée de Super Liga Srbije, le leader se déplaçait à Novi Pazar, une ville située à proximité du Kosovo et où la communauté bosniaque musulmane est largement majoritaire. Une situation particulière dans une Serbie où les plaies du nationalisme sont encore ouvertes, et où le football est un des réceptacles des tensions identitaires, à laquelle n’échappe pas le club local. Ses supporters, réunis au sein de la Torcida Sandzak qui défend une identité musulmane et des positions proches du séparatisme bosniaque, font partie des plus détestés du pays, où le nationalisme serbe reste largement dominant dans les virages. Après une saison 2020/21 intégralement à huis clos, avec le retour des supporters dans les stades ce dernier n’a pas tardé à refaire parler de lui.
Les massacres ethniques et leurs bouchers glorifiés
D’un point de vue purement sportif, ce déplacement doit être une formalité pour le Partizan. Sur le plan “politique”, c’est une autre histoire. Vers l’heure de jeu, alors que leur équipe mène 3-0, les Grobari, supporters radicaux du Partizan, ont commencé à scander le nom de Ratko Mladic, ancien chef militaire des Serbes de Bosnie et responsable des pires exactions durant la Guerre des Balkans, ainsi que le slogan ultra-nationaliste “Nož, žica, Srebrenica” (“Couteau, fil barbelé, Srebrenica”), à la gloire du massacre de Srebrenica où plus 8000 Bosniaques ont été exécutés en entre le 11 et le 16 juillet 1995. Suffisant pour que l’arbitre interrompe la partie.
Les joueurs de Novi Pazar font comprendre qu’ils ne reprendront qu’à la condition du départ des fans du Partizan des tribunes. Ce qui ne sera fait que suite à l’intervention de la police. Le match ne reprendra qu’après une interruption de 38 minutes, Balkan Insight précisant qu’aucune arrestation n’a été publiquement annoncée suite à cet événement, assez banal, notamment à Novi Pazar où les déplacements sont souvent l’occasion pour les groupes de supporters nationalistes serbes de venir s’affronter contre ceux qu’ils considèrent comme des ennemis de la nation.
No(vi) Pazar(an)!
Les incidents impliquant la Torcida Sandzak, liée aux ultras du Fenerbache, et les autres groupes du pays ne manquent pas quand les deux clubs-phare de Belgrade s’y déplacent avec leurs groupes de supporters, qui sont des repaires du nationalisme serbe depuis plusieurs décennies. Balkan Insight rappelle notamment qu’en 2016, à Novi Pazar, des centaines de fans de l’Étoile Rouge s’étaient déjà fait tristement remarqués en scandant qu’ils voulaient un “nouveau Srebrenica” et en criant des slogans tels que “Tuez-les ! Massacrez-les ! Un citoyen de Novi Pazar ça ne devrait pas exister !” Et qu’en mars 2017, les supporters radicaux de l’Étoile rouge de Belgrade, tout comme ceux du Partizan avaient célébré l’anniversaire à Ratko Mladic. Des banderoles avaient alors été déployées en hommage à celui qui a été condamné par le Tribunal de La Haye à la prison à perpétuité pour crime contre l’humanité. Il reste encore souvent considéré comme un héros par les identitaires et ultra-nationalistes serbes qui prospèrent au sein de groupes de supporters comme les Delije de l’Etoile Rouge et les Grobari du Partizan, ou encore derrière la sélection nationale.
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