Les ultras grecs mobilisés pour les sinistrés du séisme en Albanie: « La douleur et la solidarité n’ont pas de frontière »

"Solidarité avec le peuple albanais" Panthers Club 1983 | Panionios - Panetolikos (Superleague | 30.11.2019)

Le 26 novembre dernier, un violent séisme de magnitude 6.4 a frappé la partie centre ouest de l’Albanie laissant derrière lui au moins 51 morts, des milliers de blessés et des tonnes de décombres. Le coup est dur notamment pour les milliers des familles qui ont perdu leur maison et doivent faire face à des températures basses.

Sans attendre les gouvernants ou les ONG, une grande partie des ultras en Grèce a répondu à cette situation d’urgence humanitaire et a montré sa solidarité. Ainsi, depuis le 26 novembre des supporters des nombreuses équipes ont accroché des banderoles de solidarité en tribunes, et mis en place des collectes de nourriture et de produits de première nécessité, mais aussi de médicaments, de tentes et de couvertures. Certains ont été jusqu’à organiser des déplacements en Albanie.

“Votre douleur est aussi la notre, courage Albanie!” Antinazi PAS Giannina | PAS Giannina – Platanias FC (Super League 2 | 01.12.2019)

Des groupes ultras et des supporteurs de Aris, Iraklis, PAOK, Panathinaikos, AEK, Panionios et d’autres clubs, ont été particulièrement réactifs. Comme l’explique le Groupe Autonome Gate 10, plus grand club des supporters d’Iraklis, club de Thessalonique : « Nous voudrions exprimer notre solidarité au peuple Albanais pour les durs moments qu’il traverse. Nous appelons le gens dIraklis, qui ont montré plusieurs fois par le passé que la solidarité va au delà des couleurs et des nations, d’amener de la nourriture, des médicaments et des produits de première nécessité dès demain et jusqu’à samedi (jour du match de Basket). La solidarité est notre arme. »

Ces voix solidaires venant des parias du football moderne sont à souligner et nous montrent, dans des moments comme celui-ci, que le romantisme provenant des stades peut rencontrer l’humanisme et la solidarité dans la société. En Grèce comme ailleurs, les supporters les plus fanatiques sont accusés de mauvais comportements dans et en dehors des stades, parfois de chants immondes, de violences et de sales coups envers leurs adversaires, mais aussi de bagarres contre les flics etc. Mais pas seulement. En même temps, sans que ça soit la règle, la solidarité et la tradition humanitaire existent au sein des clubs de supporters, même les plus durs, notamment par le biais de collectes d’argent pour des membres ou des enfants malades, de dons envers les plus pauvres, particulièrement durant la période 2010-2015, ou encore de dons de sang.

Mais, si leur visage social, contrairement aux apparences, est une réalité depuis des dizaines d’années, les tribunes pâtissent de l’image nationaliste qui a surgit ces derniers temps, donnant une couleur plus sombre aux tribunes. Durant cette période de montée du nationalisme en tant que courant politique organisé (avec comme expression notable le parti nazi de l’Aube Dorée), il a trouvé un écho dans certaines tribunes du pays. La puissante Gate 7 de l’Olympiakos a adopté le “No Politica” en tribunes et une bonne partie au Stade Toumba du PAOK participe à la petite vague nationaliste en Grèce qui s’oppose fortement à l’État de Macédoine. Les expressions de solidarité envers les victimes du séisme en Albanie vont à l’encontre de ces supporteurs d’extrême droite et prennent encore plus d’importance au regard des relations entre les populations albanaise et grecque, qui ne sont pas toujours cordiales, encore aujourd’hui. Autrement dit, beaucoup de monde en Grèce reste raciste même si des Albanais et des Albanaises font partie de leur famille… ou leur tribune.

Panathinaikos – Baskonia | Euroleague (28.11.2019)

Au début des années 90, des centaines de milliers d’Albanais, fuyant l’Albanie post Hodja, ont traversé la frontière, souvent illégalement, à la recherche d’un meilleur avenir en Grèce. Le profits miraculeux des capitalistes grecs dans les années 90 sont en partie dus à ces ouvriers migrants qui, comme ailleurs dans le monde sont sous-payés et doivent faire face au racisme qui se développent dans le pays d’accueil. Restent dans les mémoires les émeutes et affrontements anti-Albanais qui ont eu lieu à nombreux endroits en Grèce après la victoire de l’équipe nationale d’Albanie contre celle de la Grèce en 2004, qui ont fait au moins un mort et des dizaines des blessés.

Dans la société comme dans les tribunes, les voix qui se positionnent pour la solidarité et s’opposent au nationalisme continuent à se lever. Parmi les nombreux messages, un des plus beaux est celui de la Gate 13 de Panathinaikos lors du match de basket contre Baskonia en Euroleague: “La douleur et la solidarité n’ont pas de frontière, courage au peuple albanais”.

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