Clapton CFC: Du parcours historique en coupe féminine à la lutte pour plus d’égalité

Les joueuses du Clapton Community FC posent avec leurs supporters à l'issue du match de FA Cup perdu face à Plymouth (©Twitter)

Il n’y a pas eu de suspense au Kimberley Stadium de Saltash. Au 3e tour de Women’s FA Cup, les filles de Clapton ont été logiquement battues 5-0 par Plymouth Argyle. Épilogue d’un parcours inoubliable qui a aussi permis de rappeler que des combats restent à mener pour le football féminin.

Avant le match face à Plymouth, le coach Claudio Gomes avait admis qu’à ses yeux le parcours des joueuses était déjà une victoire. Les têtes sont dorénavant tournées vers l’avenir et les combats à mener sur et en-dehors du terrain. Les joueuses ont bien entendu pris rendez-vous pour la prochaine édition de Women’s FA Cup, mais il y a aussi le retour au championnat – où elles demeurent jusqu’ici invaincues – qui les attend.

Polly Adams n’a pas suffi

La logique a été respectée. “La meilleure équipe a gagné” a reconnu le club sur ses réseaux sociaux. Mais la défaite est vite oubliée face au parcours record du Clapton Community FC, première équipe de 7e division de l’histoire à atteindre le 3e tour, et première équipe également à éliminer une équipe qui évolue quatre divisions plus haut.

Un parcours réalisé intégralement à l’extérieur et qui s’est achevé à plus de 400 kilomètres de Londres. Plusieurs dizaines de fans des Tons avaient fait le long déplacement pour pousser leur équipe qui était privée de trois titulaires: Mim Chadwick, Lucy Spours et Emily Link, la meilleure buteuse (19 buts). Mais le Clapton CFC comptait bien réitérer l’exploit du tour précédent face à Hounslow. D’autant que Plymouth, qui évolue dans le même groupe de 3e division et n’est pas au mieux (1 victoire et 7 défaites en 8 matchs).

Cette fois-ci, les quatre divisions d’écart se sont faites sentir dès l’entame de match. Menées dès la 8e minute, le Tons ont résisté une mi-temps, bien aidées par les parades de Polly Adams qui l’ont maintenu en vie. La gardienne de but enchaîne les performances de haut vol et “les Tons restent admirablement fidèles à leur style et essaient de construire depuis l’arrière“. Mais contrairement au match d’Hounslow, ça n’a pas suffi. La deuxième période a vu les Pilgrims dérouler leur football et corser l’addition avec quatre buts supplémentaires.

Le coup de sifflet final a provoqué une grande effusion d’émotions. La déception a rapidement été remplacée par la fierté de l’incroyable réussite de l’effectif et du staff. Il y avait plus que seulement quelques yeux humides autour de nous. Et ce n’était pas seulement parce que notre gardien de but leur lançait du champagne au visage !” lit-on dans le compte-rendu du Clapton Community FC. La défaite n’a en rien empêché la communion entre les joueuses et leurs supporters qui ont poursuivi la fête jusque dans le train du retour. Ce qui a encouragé le club à présenter “ses excuses les plus sincères à tous les autres passagers qui ont réservé la voiture B du service de 16:45 de la South Western Railway de Plymouth à Londres Paddington.”

“Nous devons organiser des collectes pour tout ce que nous faisons”

Les Tons pouvaient bien savourer ce moment car parvenir à se rendre à Plymouth n’a, matériellement, pas été simple. Et fouler la pelouse du Kimberley Stadium (installations habituelles de Saltash United) a déjà été une petite fierté. Le club, géré à 100% par ses membres, a en effet dû lancer un crowdfunding pour financer ce déplacement. Clapton, qui a récemment acquis son stade, n’a pas beaucoup de fonds. Mais surtout, les dotations pour les clubs qui passent les tours dans cette Women’s FA Cup sont dérisoires. Les gains des Tons ne couvraient même pas les frais du déplacement à Plymouth! La solidarité communautaire a permis d’atteindre les objectifs de la cagnotte en 24h, mais devoir passer par là pose de vraies questions.

Nous sommes très, très reconnaissants envers tout le monde“, a déclaré au Guardian Sophia Axelsson, gardienne remplaçante aussi en charge des finances de l’équipe première féminine. “Mais c’est aussi arrivé à un moment très, très délicat pour nous, car nous avons également lancé une collecte de fonds pour construire des vestiaires sur notre terrain. Avec les succès que nous avons obtenus, si nous avions été des hommes nous aurions déjà pu construire ces vestiaires. Mais parce que nous sommes des femmes, nous devons organiser des collectes de fonds pour tout ce que nous faisons au sein du club.”

En première ligne de la lutte pour un financement équitable de la Women’s FA Cup

Avant d’affronter les Pilgrims, le Clapton Community FC n’avait gagné que 2900£ pour son parcours! Les clubs féminins sortis victorieux du 3e tour n’ont empoché que 1250£ supplémentaires. Des miettes comparées aux 82000£ promis à leurs homologues masculins au même stade de la compétition. Avec son statut d’underdog ultime, le fan-owned club de l’est londonien a été propulsé en symbole de la lutte contre cette inégalité qui résulte de l’hostilité légendaire des instances dirigeantes envers le football féminin qui a été complètement interdit par la fédération anglaise entre 1921 et 1969.

Affiche du Clapton CFC réclamant l’égalité au niveau de la dotation des coupes féminine et masculine. “On n’attendra pas 50 années de plus“.

Si cette édition 2021/22 de Women’s FA Cup est terminée pour les Tons, leurs revendications ne sont pas étouffées pour autant. Au contraire, à présent, un nouveau chapitre s’ouvre pour obtenir des moyens financiers à hauteur des enjeux pour le football féminin. Et dans cette bataille, le Clapton CFC s’attend à ne pas être isolé. “Nous nous sommes fait des amis dans les clubs contre lesquels nous avons joué et des alliés dans la lutte pour un financement équitable de la Women’s FA Cup avec les clubs contre lesquels nous n’avons pas joué.” Le Stourbridge FC Ladies, qui joue en 5e division, a joint sa voix à ce combat dans son programme d’avant-match. “L’expression “rémunération égale” est souvent utilisée. Ce serait bien, n’est-ce pas? Mais nous n’y sommes pas encore, loin de là, et personne ne le demande. Mais le moins que des clubs comme Clapton méritent, c’est un traitement équitable.”

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