PAC Omonia: “Le présupposé qu’un club géré par ses membres est forcément limité ne tient pas la route”

©koutipandoras.gr

Créé seulement en 2018, le People’s Athletic Club Omonia 29M, club dirigé par ses membres, a déjà atteint la 2e division chypriote. Des membres du club ont accepté de faire un point avec nous et nous permettre de mieux le connaître. Un club qui travaille dur pour atteindre le plus haut niveau en restant fidèle aux idéaux progressistes de 1948.

Après cinq journées de championnat, le PAC Omonia occupe la tête du classement de 2e division (ex æquo avec l’Olympias Lympion et Enosis). Une trajectoire toujours aussi surprenante pour cette équipe partie de tout en bas après s’être “détachée” de leur club de toujours, l’AC Omonia – fondé en 1948 dans le girons de la gauche ouvrière – après son rachat du club par un homme d’affaire. Le PAC Omonia, un club fait pour le peuple et par le peuple, est aujourd’hui l’antithèse de l’AC Omonia duquel il n’est plus séparé que d’une seule division.

Trois montées successives en trois ans d’existence, ce sont des résultats extraordinaires. Comment expliquez-vous cette réussite sportive et pensez-vous qu’il est possible d’adapter votre modèle de fan-owned club au monde du football professionnel?

Cela résulte de deux choses ; du travail très dur de la part de tout le monde, les joueurs, les administrateurs, les supporters; mais aussi de l’histoire incarnée par nos fans et notre nom. La compatibilité de notre modèle avec le monde professionnel, on n’y réfléchit pas trop. Le chemin n’est pas balisé. Avec l’intense travail qu’on mène au quotidien, avec beaucoup de détermination et de passion, on essaye de trouver des solutions qui sont le plus en cohérence possible avec les idéaux populaires de notre club. Le présupposé qu’un club populaire est forcément limité en ressources et en qualités ne tient pas la route selon nous. Un club populaire peut à la fois être contrôlé démocratiquement par ses membres et fonctionner de façon très professionnelle, en n’ayant absolument rien à envier aux clubs gérés comme des entreprises privées.

Parlez-nous un peu du modèle économique de votre club. Comment constituez-vous votre budget et votre équipe? Qu’est-ce qui est demandé aux joueurs en terme d’adhésion au projet et aux valeurs du club ?

Au mois de mai de chaque année se tient l’Assemblée Générale à laquelle tous nos membres peuvent assister. Après un débat, nous votons le budget de la nouvelle année. Aujourd’hui le principal apport financier du club vient des membres, via les adhésions annuelles, les goodies, les abonnements, ou encore l’organisation de manifestations diverses. Le reste provient des sponsors. Nous avons des joueurs professionnels, mais notre grande différence avec la majorité des clubs modernes c’est que nos choix financiers sont plus mesurés afin de ne pas prendre le risque d’endetter le club. Ainsi, dès la création du club nous nous sommes fixés l’objectif de faire émerger des jeunes footballeurs qui n’ont pas eu l’opportunité de le faire dans leurs clubs antérieurs alors qu’ils méritaient. Il est évident que notre club défend certains idéaux et est lié à certaines idéologies. Les initiatives et actions communes organisées entre les supporters, le reste des membres et les joueurs, fait que ces derniers apprécient et s’identifient encore plus aux valeurs du club.

Un des éléments qui montre que le club grandit et se tourne vers l’avenir, c’est l’acquisition d’un terrain. Le départ de Michalis Sergiou, coach de toutes les montées, a aussi été acté.

Localement, on peut observer que les équipes des différentes catégories ont toutes progressé ces dernières années. Cette acquisition de terrain est venue après un long et intense travail. En ce moment notre objectif est que le terrain accueille notre équipe principale mais aussi les catégories jeunes pour leur entraînement. En ce qui concerne l’avenir, nous ne voulons pas faire de grands discours, nous envisageons de développer cet espace pour, à terme, qu’il serve aux matchs. Quant à Michalis Sergiou, la fin de cette collaboration résulte d’une décision commune. Nous remercions le coach pour tout ce qu’il a apporté au club et nous lui souhaitons le meilleur dans sa nouvelle équipe.

On a vu la saison passée, que ce soit à propos du nom du club ou du portrait de Skevi sur le maillot, que les instances vous traquent. Votre réussite semble les inquiéter ainsi que certains clubs. Ressentezvous de lhostilité de leur part, notamment de l’AC Omonia?

Bien sur, tous ces événements ont perturbé notre développement. Ajoutez à cela les difficultés du début, en 2018, jusqu’à ce qu’une fédération accepte qu’on participe à la catégorie amateur. A l’époque, si on n’avait pas trouvé la Fédération Pansolio et monsieur Polydorou en particulier, les choses ne seraient pas les mêmes… Mais nous sommes habitués à faire face à des petits “jeux” de ce type et ça ne fait que renforcer notre volonté à continuer à bien travailler. En ce qui nous concerne, nos positions sont claires, sûrement certains clubs nous voient comme une menace à leurs idées. Au delà de ça, nous nous occupons de nos propres affaires. Pour ce qui est de nos rapports avec Omonia, disons que ce sont les mêmes qu’avec le reste des clubs de la 1ère division.

Avec la Gate 9 – dont le siège a été récemment perquisitionné par la police – le club possède une base de fans sans pareil dans la catégorie. Quel rapport entretient le le avec club avec ses supporters organisés? Et sont-ils souvent la cible de pressions policières?

Lors de son assemblée en 2018, la Gate 9 a voté en faveur de la création d’un club fidèle aux idéaux de 1948. Elle est donc partie intégrante du club. Nous n’aimons pas catégoriser nos supporteurs, ainsi la Gate 9 est la même chose que notre club. Quant à son indépendance, en tant que supporters organisés, ils ont leurs propres instances indépendantes. Les gens qui suivent Omonia, et plus particulièrement la Gate 9, sont des cibles de la répression étatique depuis toujours. En effet, tout ce qui ne se conforme pas ou dérange le système est combattu par tous les moyens. En même temps, les membres de la Gate 9 font en sorte, à travers ses actions, de ne pas se laisser museler et de rester en première ligne contre toute sorte d’injustice.

Votre parcours attire aussi forcément les regards et l’admiration à l’étranger. Avez-vous noué des partenariats ou des amitiés au niveau international ?

Nous sommes en contact avec beaucoup de clubs et collectifs étrangers. Notre participation à SD Europe est un exemple. Nous restons ouverts à la création d’autres partenariats avec des clubs et organisations dans le monde afin de montrer notre solidarité en ces temps difficiles pour les progressistes du monde entier.

Propos recueillis et traduits par Gilberto

 

 

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